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Le Corps Franc Pommiès

L'histoire complète

Le Corps Franc Pommiès

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Le « Chef »

Après le désastre de 1940, la France, vaincue, est traumatisée et inquiète. Les conditions d’armistice sont telles que l’armée française est démantelée. Seuls subsistent, en zone sud, quelques éléments « autorisés ».
Rares sont ceux qui espèrent encore, ou croient pouvoir agir. Le capitaine André Pommiès est de ceux-là et certains, dans sa hiérarchie, le savent. C’est dans ce contexte que le 2 septembre 1940 il obtient le commandement de la 5ème compagnie à Pau et, en peu de temps, il en fait une magnifique unité, aguerrie, instruite, capable à tout moment de reprendre le combat. Cette idée de reprise de la lutte fait son chemin et le 15 novembre 1940, compte tenu de ses antécédents dans les Services Spéciaux, le colonel D’ANSELME désigne le capitaine Pommiès pour créer dans son rayon d’action la Mobilisation Secrète (MS). C’est une tâche ingrate mais passionnante et le capitaine Pommiès s’y jette à corps perdu.
Il s’est entouré de patriotes sûrs et dévoués et la MS devient un élément parfaitement structuré et crédible au point que, en novembre 1942, le capitaine Pommiès est chargé de la MS à Toulouse.

L’heure de l’action

Quelques jours après, le 11 novembre 1942, à 6h30, les Allemands envahissent la zone sud… L’heure des grandes décisions a sonné. Certains officiers décident de gagner l’Afrique du Nord, d’autres préfèrent « pantoufler » et attendre… Le capitaine Pommiès décide de rester en France et de combattre en métropole : le 17 novembre 1942 il crée le Corps Franc « P » (« p » pour Pyrénées) dans la clandestinité. Quand les combattants connaîtront le nom de leur chef, ils désigneront cette unité sous le vocable de Corps Franc Pommiès.
La mise en place du Corps Franc n’est pas une mince affaire : l’armement sera prélevé sur les dépôts de conservation du matériel (CDM) et la sécurité sera assurée par des cloisonnements et des coupures. L’encadrement pose un problème mais il est résolu, en partie, grâce à l’appui des colonels qui ont permis la rencontre, le 28 novembre 1942, avec le colonel Schlesser. Il avait laissé en France, à disposition du capitaine Pommiès, le capitaine De Neuchèze et plusieurs cadres et dragons en garnison à Auch.
A Pau, les lieutenants Schneider et Robert se sont engagés d’emblée de sorte que, début janvier 1943, la pyramide de commandement est en place.
Le CFP est dès lors une unité parfaitement structurée et opérationnelle et c’est dans ce contexte que le 19 février 1943, en gare de Toulouse Matabiau, le colonel Pfister apprend au capitaine Pommiès que, le 4 décembre 1942, quelques officiers de l’état-major de l’armée ont créé l’OMA (Organisation Métropolitaine de l’Armée) organisation clandestine ayant pour but de chasser l’occupant du sol national et il lui propose d’œuvrer en son sein. Elle deviendra plus tard l’ORA (Organisation de Résistance de l’Armée.) Après avoir obtenu en retour l’engagement que la politique en restera bannie, le chef Pommiès accepte.

L’organisation

Constitué uniquement de volontaires, en majorité originaires du Sud-Ouest de la France, encadré d’officiers et de sous-officiers d’active (armée de l’armistice) et de réserve, le Corps Franc Pommiès était organisé en groupes de 30 à 50 chasseurs, sous le commandement d’un chef. Il n’y avait pas de galons au CFP. Il y avait des chefs de section, de compagnie, etc. Les chasseurs du CFP étaient, en partie, en uniforme des chantiers de jeunesse ou en civil.
Du 17 novembre 1942 au 5 juin 1944, le CFP s’organise clandestinement : ses activités consistent essentiellement à recruter et à encadrer des hommes (jeunes réfractaires du STO), à obtenir des renseignements, à saboter des voies de communication et des unités de production de matériel ou d’énergie, cependant qu’une partie de ses éléments attaque l’ennemi, met hors état de nuire 68 officiers ou agents de la Gestapo (la plupart d’envergure). Des membres de ses services spéciaux pénètrent dans les services secrets du S.R. allemand et démasquent des membres importants. En même temps, il détruit méthodiquement les principaux moyens de transport, de production d’énergie dont dispose la région du Sud-Ouest.

Le débarquement Allié

Au 6 juin 1944, avertis du débarquement, les quelques 12 000 hommes du Corps Franc Pommiès effectuent une véritable « sortie de l’ombre » et s’adonnent à une lutte ouverte face à l’occupant : embuscades, guérilla et sabotages rythment le quotidien des hommes du maquis. Après leur participation à la libération des villes et villages du Sud-Ouest, du mois de juin au mois d’août 1944, les hommes de Pommiès se regroupent à Toulouse. Commence alors leur marche vers le Nord-Est qui les conduira à Autun (septembre 1944), puis les villages et les sommets des Vosges, durant le rude hiver 1944/1945 ; ils arriveront à Stuttgart (avril 1945) et, finalement, Berlin.

Les actions du Corps Franc Pommiès

Actions jusqu’au 6 Juin 1944

68 officiers ou agents de la Gestapo ont été mis hors d’état de nuire.

Actions de destruction

19 décembre 1943 – MONTAUBAN (82) : 19 locomotives à vapeur mises hors d’usage au dépôt.
14 janvier 1944 – MONTAUBAN (82) : 9 locomotives hors d’usage sur les 18 attaquées.
30 janvier 1944 – CAHORS (46) : 10 locomotives à vapeur mises hors d’usage.
5 mars 1944 – CASTELSARRASIN (82) : usines mises hors d’usage.
11 mars 1944 – CUGNAUX (31) : usine Dewoitine, transformateurs et stocks de voilure détruits. Plafond de l’usine effondré.
25 mars 1944 – MONBARTIER (82) : fonderie, transformateurs et une motrice détruits.
8 avril 1944 – BOUSSENS (31) : destruction de 6 transformateurs et incendie d’un stock de 300 000 litres d’huile et de toluène.
14 avril 1944 – PAU (64) : destruction de l’usine SFOM.
15 avril 1944 – TARBES (65) : usine Hispano-Suiza ; outillage rendu inutilisable et fermeture de l’usine pour 2 mois.
17 avril 1944 – TOULOUSE (31) : usine de la SNCASE ; destruction de l’outillage, bâtiments endommagés, usine arrêtée.
28 avril 1944 – MURET (31) : destruction de 2 châssis métalliques servant à la fabrication d’ailes de Focke Wulf, transportés d’OSSUN à TOULOUSE.
5 mai 1944 – PAU (64) : usine SFOM définitivement détruite.
VIEILLE-TOULOUSE (31) : ligne à haute tension coupée.
10 mai 1944 – BÉRAT (31) : 3 pylônes détruits.
SAINT-GAUDENS (31) : 3 pylônes détruits.
POUY (65) : 3 pylônes détruits.
12 mai 1944 – (31)-(64)-(65)-(82) : pylônes lignes à haute tension détruits. Coupure de la voie ferrée MONTAUBAN-BRIVE
13 mai 1944 – MONTGAILLARD (65) destruction de 3 pylônes sur la ligne à haute tension.
25 mai 1944 – TARBES (65) : mise hors d’usage et destruction d’appareils à l’Arsenal.

Les principales actions de libération nationale après le 6 Juin 1944

6 juin 1944 : Gourdan-Polignan (65) : destruction totale des installations de la gare, attaque, déraillement et destruction d’un train de 30 wagons.

7 juin 1944 : Gourdan-Polignan (65) : rencontre avec l’ennemi ; nos pertes (2 tués)

8 juin 1944 : Destruction de centraux, de lignes électriques, de lignes téléphoniques et télégraphiques, de voies ferrées un peu partout dans le Sud-Ouest. Chaque jour suivant verra autant de sabotages et de destructions.
Soumoulou (64) : attaque d’un convoi allemand de 14 véhicules ; pertes ennemies : 4 officiers tués, 1 blessé ; décrochage sans incident ni perte mais 3 civils tués en représailles.
Moncassin (32) : attaque de 2 voitures allemandes ; nos pertes : 1 tué, 1 blessé mort plus tard de ses blessures, 2 prisonniers morts en déportation.
Castelvieilh (65) : attaque de 3 camions ennemis ; nos pertes : 5 hommes dont 1 officier ; pertes ennemies : une trentaine d’hommes brûlés dans un camion incendié.
Gourdan-Polignan (31) : accrochage avec les éléments allemands ; nos pertes : 3 tués ; pertes ennemies : 1 prisonnier.
Aubiet (32) : accrochage avec 2 auto-mitrailleuses allemandes ; nos pertes : 2 blessés ; pertes de l’ennemi : 2 tués, 8 blessés.

9 juin 1944 : Moncassin (32) un groupe ennemi est mis en fuite au Château de Lapalu après avoir été assiégé ; pertes de l’ennemi : 1 tué et 3 blessés.
Chélan (32) : accrochage au Pont avec un convoi ennemi ; nos pertes : 1 tué ; pertes ennemies : 6 tués, 4 blessés.
Monlong (65) : accrochage avec des troupes ennemies : pertes ennemies : 8 tués.
Riscle (32) : accrochage avec la milice : nos pertes : 2 blessés ; pertes adverses : 4 miliciens prisonniers.

10 juin 1944 : Riscle (32) : camion allemand attaqué ; personnel mis en fuite.

11 juin 1944 : Castéra-Lou (65) accrochage avec une troupe ennemie ; nos pertes : 3 tués ; pertes ennemies : 10 tués et 20 blessés.

12 juin 1944 : Assat (64) : attaque au Pont d’un convoi de 5 véhicules ; pertes de l’ennemi : 5 tués.
Aire-Sur-l’Adour (40) : attaque d’un camion allemand ; pertes de l’ennemi : 3 tués, 3 blessés.

13 juin 1944 : Aire-Sur-l’Adour (40) : une colonne allemande prend en chasse 2 de nos véhicules ; nos pertes : 8 blessés, brûlés vifs.
Astaffort (47) : gros engagement contre les Allemands et la milice ; nos pertes : 11 tués et 2 blessés ; pertes de l’ennemi : 68 tués et 20 blessés.
Pujaudran (32) : guérilla contre des éléments ennemis en camions avec un de nos bataillons. Pertes inconnues.

(d’après le Journal de Marche du Corps Franc Pommiès)