Hauts Lieux de Mémoire du Gers

Guy Labédan-Résistant (Correspondant de l’Institut d’Histoire du Temps Présent)

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Guy Labédan-Résistant (Correspondant de l’Institut d’Histoire du Temps Présent)

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UN SURVOL DE LA RÉSISTANCE DANS LE GERS

par Guy LABEDAN, Correspondant du Comité d’Histoire de la Deuxième Guerre mondiale.

Lorsque dans la matinée du 17 juin 1940, le Maréchal PETAIN lance sur les ondes de la radio Nationale, les seules ou presque accessibles, son appel en faveur de l’Armistice, le consensus n’est pas fort heureusement général. Des gens pleurent, d’autres consternés, se disent « ce n’est pas possible…la France se ressaisira « . Il y a enfin, ceux, peu nombreux, qui connaissant les vrais desseins de l’ex vainqueur de Verdun, pensent à un coup monté contre la République. Ce seront les premiers résistants, les autres emboîteront le pas le moment venu.

L’opposition, d’abord larvée, va prendre corps. Elle se fortifie autour de Fernand MAUROUX, industriel à Auch, qui est apparenté par son fils (mort en déportation) à P.H. TEITGEN, co-fondateur avec F. de MENTHON du mouvement « LIBERTE ». Nous sommes en novembre 1940. De droite ou de gauche, la Résistance est née. Autour de MAUROUX, il y a Ernest VILA, directeur d’école, Georges DAUBEZE, vétérinaire, Jean BOURREC, professeur adjoint au lycée et Louis VILLANOVA, agent militaire, tous à Auch.

A Mirande, un autre noyau se forme avec le Commandant VIGNOLLES, d’autres officiers et le civil Henri LARCADE.
L’armée, en effet, n’est pas en reste. Un nouveau régiment qui a résisté de magnifique façon en juin 1940, le 2ème Dragons s’installe à Auch. Son commandant, le Lieutenant Cl. SCHLESSER était, il y a peu, le chef du contre-espionnage en France. Il est le germanophobe par excellence, secondé remarquablement par ses officiers dont le Capitaine DE NEUCHEZE. Ceux-ci s’emploient notamment à dissimuler un peu partout du matériel de guerre, soustrait au contrôle des Commissions d’Armistice.
D’autres contacts font entrer dans la Résistance organisée le carrossier DUBOS et le Capitaine aviateur SAHUC. Viennent aussi Auguste SEMPE de Pessan, Alexandre BAURENS de Beaucaire sur Baïse.
C’est l’époque des tracts, circulant sous le manteau, et de celle plus risquée des graffitis. Le Général LAURE, venu le 26 juillet 1941 préparer l’arrivée du Maréchal PETAIN, en saura quelque chose.
En novembre 1941, « LIBERTE » fusionnant au plan national avec « VERITE » devient « COMBAT », la plus forte organisation dans le Gers.
Mais entre temps, le groupe auscitain a eu des contacts avec une organisation qui s’est créée à Toulouse, appelée « réseau BERTAUX ». On parle sérieusement de parachutage. Malheureusement l’un des conjurés pris par la police a parlé, aussi, DAUBEZE est-il arrêté le 25 novembre 1941.
L’année suivante, c’est au tour de MAUROUX d’être incarcéré. Il paye en sa qualité de détenteur d’explosifs de carrière la première manifestation – bruyante – de la Résistance, consistant à faire sauter le kiosque à journaux de la place Maréchal PETAIN à Auch qui étale ostensiblement la littérature vichyssoise.
Un autre mouvement voit le jour dans le Gers : « LIBERATION » ou « LIBE -SUD ». Venant lui aussi de Toulouse, il s’implante à Auch et à Riscle.

Mais le 11 novembre 1942, les Allemands sont là. Ils s’installent à Auch, Condom et Nogaro. Le 2ème Dragons est démobilisé, mais avant de se séparer, les hommes sont exhortés par leur chef de corps à reprendre le combat le moment venu.
Des pelotons entiers se regroupent dans des chantiers forestiers au début de 1943, constituant les premiers maquis : berdoues, Manciet, Miélan, Ordan-Larroque.
Le 16 février 1943, vient la loi sur le service du Travail Obligatoire (STO), appelant nos jeunes gens à partir en Allemagne. Mais tous ne répondent pas et de moins en moins. Ils préfèrent rejoindre l’AFN par l’Espagne (une soixantaine environ), entre dans le maquis de l’Armée ou tout simplement se cacher dans des fermes amies, avec de fausses identités, mais sous le contrôle de la Résistance.

C’est qu’en effet, la résistance s’est faite plus structurée et efficace. Au printemps 1943, sont créés, les « Mouvements Unis de la Résistance » qui regroupent « Combat, Franc-Tireur, Libération ». A leur tête on retrouve VILA qui rejoint BAURENS à la campagne très activement secondé par BOURREC. L’Armée Secrète avec pour chefs VILLANOVA et TERMIGNON constitue son expression militaire.

Les anciens dragons, auxquels se sont joints, comme on l’a vu, des éléments civils, restent l’Armée. On dira aussi « L’Armée Régulière ». Son chef, n’est autre que le Capitaine DE NEUCHEZE.
L’entente est parfaite entre les deux formations. Le commandement unifié est assuré par DE NEUCHEZE. Quand celui-ci doit quitter la région, il est remplacé par son adjoint TERMIGNON. Après septembre 1943, d’ordre supérieur, chaque mouvement reprend sa liberté.
Les parachutages procurent l’armement. Le premier a lieu dans la nuit du 1er mai 1943 sur les communes de Marsan et de Montaut-les-Créneaux, suivi de ceux de Saint-Médard et de Miramont-Latour au mois d’août et de Lectoure en octobre ou novembre de la même année.

Surgit la répression allemande qui n’aura lus de cesse. Le personnel de l’ »imprimerie Moderne » à Auch d’où sortent « Les cahiers de la Libération » est arrêté par la Gestapo le 11 décembre 1943. Le maquis de Berdoues, Ponsampère est surpris au matin du 14 suivant et la totalité des hommes déporté.

Dans la nuit d 9 au 10 mars 1944, les résistants d’Auch : BOURREC, CANUT, DAUBEZE, DESBUREAUX, LABADENS, MARAMBAT, MOUCHET sont appréhendés par la police allemande, puis déportés en Allemagne.
Pour si dure que soit la répression, l’occupant ne peut plus endiguer la poussée de la Résistance. En prévision du débarquement, elle lève de véritables bataillons, quadrillant l’ensemble du département : au Nord, le Bataillon PROSPER (GIRAL), à l’Est et au Sud-Est, le Bataillon RAYNAUD, au Sud, le Bataillon SOULES et surtout à l’Ouest le Bataillon de L’ARMAGNAC aux ordres du Capitaine PARISOT, d’origine lorraine. Cette dernière unité sera de loin, la plus forte et la mieux équipée grâce à l’aide matérielle que lui fournit le Colonel anglais STARR ou « HILAIRE » du « Special Operation Executive » le S.O.E.
A partir d’avril 1944, presque tous les parachutages seront pour elle.
Non moins puissant est le Corps Franc Pommiès, issu de l’Armée. Ses formations sont essentiellement mouvantes. Ajouter une centaine de Franc Tireurs et Partisans.
Au 6 juin 1944, plan « Vert » et plan « Violet » sont déclenchés dans tout le département, selon les instructions du Haut Commandement allié par le maquis tandis qu’il attaque les convois allemands circulant sur les routes. Le 1er affrontement a lieu le 8 juin 1944 à St-Maur. D’autres vont suivre :
Castrelnau-sur-l’Auvignon : 21 juin 1944, Estang : 3 juillet 1944 pour ne citer que les plus importants. Il en est aussi qui finissent tragiquement :
Meilhan : 7 juillet 1944
Viella : 26 juillet 1944
Le 19 août 1944, la garnison allemande quitte Auch, pais est stoppée par le Bataillon de l’Armagnac à l’isle-Jourdain. Le combat durera jusqu’au lendemain soir entraînant la reddition de l’ennemi.
Le Gers s’est donc libéré seul. Mais il aura perdu en deux ans d’occupation allemande 182 hommes, auxquels il faut ajouter 307 déportés (168 non rentrés).
Enfin, 41 ouvrages d’art ont été détruits ou sérieusement endommagés.